D ’UN HOMME QUELCONQUE À UN BOURREAU: „LA MORT EST MON MÉTIER“ DE ROBERT MERLE

Наслеђе 58 (2024) [97-110]

АУТОР(И) / AUTHOR(S): Katarina V. Melić

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DOI: 10.46793/NasKg2458.097M

САЖЕТАК /ABSTRACT:

La parole du bourreau nazi est rare dans la littérature. Bien avant Jonathan Littel ou Laurent Binet, Robert Merle publie en 1952, en pleine période d’amnésie collective, un roman La mort est mon métier qui passe assez inaperçu : il est jugé comme politiquement incorrect pour deux raisons : il remet en cause les « interdictions » majeures – écrire de la poésie après Auschwitz, fictionner les camps et présenter un récit qui n’est pas celui d’un témoin survivant, mais d’un bourreau. Cette étude a pour but d’analyser pourquoi Robert Merle donne la parole au bourreau nazi, Rudolf Hoess/Rudolf Lang, commandant du camp de concentration d’Auschwitz. Dans son portrait du bourreau, Merle anticipe le concept de la « banalité du mal » d’ Hannah Arendt. Sa représentation du bourreau ne correspond pas au stéréotype du SS monstrueux et démoniaque : nous verrons dans notre analyse  que, dans l’autobiographie fictive de Rudolf Hoess, Robert Merle adopte le point de vue du bourreau et fait un portrait en contre-exemple, celui d’un homme banal, ambitieux, dénué de sentiments et d’empathie, grimpant les échelles du parti nazi pour devenir un des architectes de  la « solution finale » de la question juive.

КЉУЧНЕ РЕЧИ / KEYWORDS: 

Bourreau, banalité du mal, nazisme, Zone d’intérêt, La mort est mon métier, Robert Merle, Rudolf Hoess, Auschwitz, solution finale, responsabilité

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